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Construction : la prochaine réglementation est sur les rails

Publié le 29 avril 2017

Avec 45 % de l’énergie finale consommée chaque année, le bâtiment est le secteur le plus énergivore. La loi Grenelle 2 de mai 2009 évoquait déjà l’impact global du bâtiment sur son environnement. Avec la RT 2012, de nombreux progrès ont été réalisés pour construire des bâtiments plus vertueux, moins gourmands en énergie.

La loi du 18 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte va plus loin, en introduisant des exigences énergétiques et environnementales pour la construction neuve. L’article 4 du Titre II prévoit un objectif de performance énergétique qui annonce la généralisation des bâtiments à énergie positive à l’horizon 2020. Les textes d’application publiés depuis définissent cette notion et introduisent le sujet de l’autoconsommation.

Le 17 novembre 2016, les ministres de l’Environnement, Ségolène Royal, et du Logement, Emmanuelle Cosse, ont lancé à la fois une expérimentation et un label afin de préparer la future réglementation sur les bâtiments neufs, prévue pour 2020. Baptisé « Énergie Positive et Réduction Carbone E+C- », ce nouveau label valorise les bâtiments performants selon des niveaux requis et un référentiel. Il est délivré par des certificateurs – dont Promotelec Services.

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La prochaine réglementation concernant la construction répondra à l’ensemble des enjeux du bâtiment, sur un plan à la fois énergétique et environnemental. Il s’agit de la première réglementation réunissant à la fois des exigences en matière d’énergie et d’émissions de gaz à effet de serre.

Pour l’énergie, il compte quatre niveaux de performance :

  • le premier niveau Énergie est assez proche de la réglementation thermique actuelle, avec une baisse de 5 % de la consommation d’énergie primaire ;
  • le deuxième niveau est à - 10 % ;
  • le troisième niveau est à - 20 % avec l’introduction obligatoire d’un système d’énergies renouvelables ;
  • le niveau 4 exige que la consommation d’énergie non renouvelable soit intégralement compensée par une production d’énergie renouvelable, et cela en comptant non plus les cinq usages réglementaires (chaud, froid, eau chaude sanitaire, éclairage et auxiliaires), mais l’ensemble des consommations électriques. Ce niveau Énergie 4 constitue donc une étape bien plus importante que les trois autres.

Du côté du carbone, le changement est le plus radical. Conformément à la loi de transition énergétique, le nouveau référentiel prend en compte les émissions de CO2 liées à la construction, à l’exploitation et à la destruction d’un bâtiment.

Pour le carbone, il compte deux niveaux de performance :

  • le niveau Carbone 1 correspond à celui d’une maison RT 2012 plutôt vertueuse ;
  • le niveau Carbone 2 divise par deux le plafond autorisé.

Nous espérons que ce niveau d’exigence carbone pourra redonner plus de sens à l’électricité pour l’effet Joule, mis au ban par la RT 2012.

Autre conséquence : plus un bâtiment comptera de tonnes de matériaux, plus mécaniquement son bilan carbone sera alourdi, sauf si une majorité de matériaux peuvent être recyclés en fin de vie. Les bureaux d’études vont devoir apprendre à effectuer ces calculs à l’aide de logiciels spécifiques, qui additionneront sur la base des fiches de données environnementales et sanitaires (FDES et PEP) le bilan carbone de chaque matériau, pour une durée de vie totale du bâtiment fixée à 50 ans. Une évolution qui va contraindre les filières industrielles à accélérer la mise en ligne de leurs FDES.

L’expérimentation, co-pilotée par l’État et le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE), permettra, selon les deux ministères, aux maîtres d’ouvrage volontaires de tester en grandeur nature « la faisabilité technique et économique des solutions permettant la réduction des consommations énergétiques non renouvelables, le déploiement des énergies renouvelables et le recours à des matériaux, systèmes énergétiques ou encore techniques constructives à faible empreinte carbone ».

Un site dédié, www.batiment-energiecarbone.fr a été créé pour accompagner cette expérimentation qui repose sur une méthode d’évaluation des bâtiments exemplaires, mise en place par l’État.

Pour aller plus loinconsulter la lettre de Promotelec Services dédiée à ce sujet

Interview

« Devenir co-acteurs de la règlementation »

Koumaran Pajaniradja, adjoint au sous-directeur de la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature

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Koumaran Pajaniradja

Association Promotelec : Quelle est la finalité de l’expérimentation mise en place par les Pouvoirs publics ?

Koumaran Pajaniradja : Elle est de préparer une réglementation environnementale du bâtiment à horizon 2018 prenant en compte les faisabilités technique, financière, économique et donc de soutenabilité pour le marché de la construction. L’expérimentation est bien entendu ouverte aux bâtiments d’habitation, individuels comme collectifs et au secteur tertiaire.

À quand les premiers retours ?

K.P : La condition première réside dans le nombre de maîtres d’ouvrage jouant le jeu. Si la dynamique est assez forte pour obtenir un échantillon représentatif, les premiers retours devraient être disponibles à la mi 2017 ou au second semestre. Il est aussi envisagé de procéder à des analyses du cycle de vie de bâtiments en cours de construction pour disposer de retours d’expériences plus rapidement. On travaille actuellement avec les fédérations professionnelles, et elles-mêmes avec leurs adhérents, pour encourager les maîtres d’ouvrage, promoteurs, à tenter cette expérimentation. Comme annoncé dans la loi, la future réglementation devrait entrer en vigueur en 2018 pour le carbone et 2020 pour le Bâtiment à énergie positive. Déjà, des maîtres d’ouvrage osent l’ambition de concilier les deux dimensions.

Qu’en est-il des éventuelles aides à l’expérimentation ?

K.P : Construire aujourd’hui une opération de logements collectifs respectant les standards énergétiques et carbone du référentiel, donc beaucoup plus exigeants que la RT 2012, génère des surcoûts liés aux études, travaux, solutions techniques, surcoûts qu’il nous faut bien cerner. La finalité est de les évaluer pour savoir si le niveau réglementaire envisagé demain ne va pas constituer un frein pour le marché mais un plus pour répondre aux objectifs de la loi tout en étant compatible avec le marché.

À cet effet, nous avons mis en place un ensemble d’aides financières que nous avons déjà présenté aux fédérations professionnelles. Ces dispositifs vont faire l’objet de plaquettes et de communication, notamment en lien avec l’Ademe qui va mobiliser un budget pour aider les maîtres d’ouvrage à absorber les surcoûts liés aux analyses de cycle de vie, la grande nouveauté de la réglementation étant le bas carbone.

Le Mouvement Hlm s’est, pour sa part, particulièrement distingué en signant lors du Congrès de Nantes en septembre 2016, une convention d’engagement dans la démarche France Energie Carbone et à produire un nombre significatif de logements respectant différents niveaux d’ambition fixés dans le référentiel. Une enveloppe financière dédiée, encore en cours de négociation, se traduira par des prêts bonifiés ou des dispositifs apparentés. Ils accompagneront les maîtres d’ouvrage qui font l’effort de s’engager dans l’expérimentation en les aidant à faire face à des surcoûts qui se verront ainsi en partie compensés.

Quel est l’intérêt des acteurs professionnels dans cette démarche ?

K.P : C’est une expérimentation qui représentera certes des coûts pour les maîtres d’ouvrage, mais nous faisons un pari que nous souhaitons gagnant/gagnant. Avant, certains acteurs reprochaient à l’administration de préparer les réglementations un peu seuls, hors-sol, puis les acteurs devaient les appliquer. Aujourd’hui, nous changeons complètement la méthode en proposant aux acteurs, après avoir co-construit le référentiel et fixé les niveaux de seuils, d’expérimenter ensemble et en toute transparence la construction de tels bâtiments performants. À être co-acteurs de la réglementation, les maîtres d’ouvrage, concepteurs, entreprises, se familiariseront progressivement avec la future réglementation pour mieux l’appréhender en y contribuant. Les Pouvoirs publics y gagneront une réglementation qui respectera les objectifs environnementaux et qui sera applicable en termes de faisabilité technique, financière et de courbe d’apprentissage.

Reste qu’il va falloir déployer des efforts de formation, des petits bureaux d’études notamment, des cabinets d’architecture encore, de pédagogie, d’accompagnement des éditeurs de logiciels dans le développement d’outils permettant de produire des ACV. À côté du volet solutions techniques, soutenabilité économique, il y a tout un volet montée en qualité, en compétence de toute la filière (maîtres d’ouvrage, conception, mise en œuvre).

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