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Permis de louer : « Nous sécurisons le parcours entre locataires et propriétaires »

Publié le 04 octobre 2018

Instauré en 2016 par la loi Alur, le permis de louer permet aux collectivités locales d’imposer aux propriétaires bailleurs une déclaration ou une autorisation préalable de mise en location de leur logement. Plusieurs municipalités l’ont déjà adopté pour renforcer leur lutte contre l’habitat indigne. Parmi elles, la ville de Villemomble, en Seine-Saint-Denis, fait partie des premières à l’avoir mis en place. Patrice Calméjane, maire de Villemomble, nous explique ce dispositif.

Quand le permis de louer a-t-il été instauré à Villemomble ?

À Villemomble, le permis de louer est entré en vigueur le 1er janvier 2018, mais la délibération a eu lieu en avril 2017. Il a fallu respecter un délai de 6 mois pour informer les agences immobilières et les propriétaires avant de mettre en œuvre ce permis.

Ce délai nous a permis d’établir une stratégie, de recruter un agent et de décider d’une tarification des visites de l’agent, tarification qui n’est pas systématiquement appliquée dans les autres municipalités ayant adopté le permis.

Patrice-Calmejane-maire-de-Villemomble

Pourquoi avoir choisi de tarifer ces visites ?

Nous sommes ici face à une nouvelle mission qui sécurise le parcours entre le locataire et le propriétaire. Une mission qui nous incombe et pour laquelle l’État ne nous accompagne pas, notamment sur le plan économique. Ces visites sont un nouveau service que la municipalité rend pour protéger le locataire, et je trouve normal de le tarifer, ne serait-ce que pour financer son fonctionnement. Nous avons choisi de nous appuyer sur le tarif moyen d’un état des lieux d’huissier, à savoir un peu moins de 150 euros la visite.

Pour quelle raison avez-vous adopté ce permis de louer ?

Après des années de terrain, à entendre les citoyens  nous faire remonter les difficultés rencontrées dans leur logement, nous pointer leurs problèmes d’électricité, nous alerter sur leurs conditions de vie dans des logements insalubres, nous avons décidé d’agir et d’interrompre la spirale négative dans laquelle nous étions enfermés. Il faut bien comprendre que le problème du mal-logement n’est pas seulement résolu une fois qu’une famille en difficulté est relogée dans un logement décent, il est résolu une fois que le logement insalubre est mis aux normes.

Le permis de louer est-il obligatoire pour l’ensemble des biens locatifs ?

Nous avons exclu les constructions de moins de 10 ans, considérant qu’elles répondent à un certain nombre de normes et n’ont pas encore eu le temps de se dégrader, du moins je l’espère. Le parc social sort également du champ de ce permis car il dispose de son propre système de contrôle via les services de l’État.

Comment cette mesure a été accueillie par les propriétaires bailleurs ?

Il y a eu quelques réticences au début, les agences et les propriétaires considéraient cette mesure comme une contrainte supplémentaire. Ils avaient notamment peur d’un risque de délai supplémentaire avant de pouvoir louer. Nous avons donc fait en sorte d’avoir un délai administratif rapide, qui ne retarde pas l’entrée dans les lieux dès que les démarches sont bien réalisées en temps et en heure.

Combien de dossiers ont été traités depuis l’entrée en vigueur du permis de louer ?

Depuis le 1er janvier, nous avons traité plus de 250 dossiers.

Combien de refus ?

Nous sommes environ à 8,5 % de dossiers refusés. Ce taux monte à un peu moins de 10 % lorsque ce sont des biens gérés en direct, de particulier à particulier. Le travail de sélection des agences filtre déjà une partie des logements non « louables ».

Nous pouvons également émettre des réserves concernant certains logements lorsque des dysfonctionnements sont repérés, sans pour autant refuser leur dossier. Des réserves qui concernent le plus fréquemment la présence d’anomalies dans le domaine électrique. Dans ces cas, nous n’interdisons pas la location mais nous mettons en garde sur l’obligation de mettre en conformité l’installation.

Quelles sont les remontées de ces permis ? Quelles anomalies sont les plus relevées ?

Des problèmes de chauffage, de gaz, mais l’élément principal reste les protections électriques. Notre agent est une personne issue du secteur du bâtiment et a la capacité de vérifier visuellement et techniquement la présence de ce type d’anomalies.

Le refus d’un dossier se traduit-il forcément par des travaux pour remettre le logement aux exigences de décence ?

Nous faisons part d’un refus de louer. Si le propriétaire loue malgré cela, il se met en contradiction avec la loi. Mais les mairies ont une faculté de constat, pas de sanction et nous pouvons difficilement traquer cette « fraude » à la location. Dans le cas du permis de louer, la police administrative est assurée par la préfecture. C’est elle qui doit sanctionner même si elle ne semble pas forcément se donner les moyens d’aller au bout de cette démarche.

L’Île-de-France est particulièrement intéressée par le permis de louer. Plusieurs municipalités l’ont déjà mis en place ou ont fait part de leur intérêt dans le dispositif. Comment l’expliquez-vous ?

L’Île-de-France a un patrimoine immobilier assez ancien, avec des habitations qui datent parfois du 19ème siècle, comme à Paris. C’est une région où il y a également des poches assez importantes de paupérisation, avec de l’habitat dégradé. Comme la pression du logement est encore plus forte qu’ailleurs, la tentation est forte de louer des biens non conformes.

Pensez-vous que la lutte contre l’habitat indigne doit forcément être contraignante, pour ne pas dire « punitive » ?

C’est comme dans tous les dossiers. Il y a toujours ceux qui accepteront de se mettre aux normes de bonne volonté. Je prendrai l’exemple de la voiture : 80 % des automobilistes roulent normalement sur les autoroutes ou les nationales. Nous avons tout de même été obligés de réglementer, voire de  pénaliser, parce que les 20 % restants vont présenter 50 %, 70 % du risque potentiel ou des accidents.

C’est le principe des lois, si tout le monde les respectait, tout se passerait bien dans le meilleur des mondes. Seulement, en matière d’habitat, il y a toujours des individus qui font prendre des risques à des personnes faibles, des familles, des personnes isolées... La loi est donc là pour protéger ces personnes du risque en réglementant.

Permis de louer : comment ça marche ?

Le permis de louer permet aux mairies de définir des secteurs géographiques, voire des catégories de logements ou ensembles immobiliers, pour lesquels la mise en location d’un bien doit faire l’objet d’une déclaration ou d’une autorisation préalable.

  • Le régime de la déclaration de mise en location oblige les propriétaires à déclarer à la collectivité la mise en location d’un bien dans les 15 jours suivant la conclusion d’un nouveau contrat de location.
  • Le régime d’autorisation préalable de mise en location conditionne la conclusion d’un contrat de location à l’obtention d’une autorisation préalable. Délivrée dans un délai d’un mois, cette autorisation est valable deux ans suivant sa délivrance si le logement n’a pas été mis en location. Le transfert de l’autorisation à un nouvel acquéreur d’un logement s’effectue sur simple déclaration auprès de l’EPCI ou de la commune.

>> Pour télécharger les formulaires CERFA : cliquez ici.

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